Nouvèl ak Analiz

Haïti : une nation dévorée par des prédateurs, de l’extérieur comme de l’intérieur

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Par Wandy CHARLES

Dans son ouvrage « Nation cannibale », In Koli Jean Bofane expose avec une clarté implacable les mécanismes d’exploitation qui permettent aux grandes puissances de se nourrir des richesses des nations du Sud. Si ce texte s’inscrit dans une réflexion globale sur la mondialisation et ses dérives, il résonne douloureusement dans le contexte haïtien, où les dynamiques de prédation, de dépendance et de désespoir sont omniprésentes.

Haïti, première République noire à avoir conquis sa liberté par une révolution légendaire, est aujourd’hui enchaînée par des forces qui la dévorent de l’extérieur comme de l’intérieur. À l’image de l’analyse de Bofane, notre pays se trouve pris dans un cercle vicieux où l’exploitation économique, la corruption et l’ingérence étrangère se mêlent dans un ballet macabre. Cette « cannibalisation » ne se limite pas aux ressources naturelles ou aux opportunités économiques ; elle s’étend à l’âme même de la nation, à sa souveraineté, à son identité.

La cannibalisation économique et politique

Les accords commerciaux inégaux, les prêts internationaux assortis de conditions draconiennes et l’absence de stratégies de développement durable maintiennent Haïti dans une position de dépendance chronique. À cela s’ajoute une élite économique qui, au lieu de renforcer la base productive nationale, choisit souvent de servir ses propres intérêts, contribuant ainsi à la destruction des structures locales.

Les dirigeants politiques, eux aussi, portent une lourde responsabilité. Le pays, gangrené par une corruption systémique, ressemble à une table où chacun cherche à tirer sa part, laissant les plus vulnérables sans rien. Ce cycle d’échec renforce la dépendance vis-à-vis des aides extérieures, qui, paradoxalement, agissent comme un levier pour maintenir ce système en place.

L’ingérence et la perte de souveraineté

Comme Bofane le démontre dans son livre, la mondialisation n’est pas seulement un échange d’opportunités ; elle est aussi un outil de domination. Les décisions cruciales pour l’avenir d’Haïti sont souvent prises hors de ses frontières, sous l’impulsion d’organisations internationales ou de pays étrangers qui prétendent œuvrer pour le bien commun tout en poursuivant leurs propres intérêts géopolitiques et économiques. Cette ingérence constante empêche toute tentative de reprise en main de notre destin collectif.

Cependant, Haïti n’est pas une terre condamnée à être consumée à jamais. Comme le souligne indirectement l’œuvre de Bofane, il existe une forme de résilience au sein des peuples exploités. Pour se libérer de ce cercle de prédation, Haïti doit d’abord se regarder en face. Nous devons poser des questions difficiles : comment restaurer un leadership intègre et visionnaire ? Comment reconstruire des institutions capables de protéger les intérêts de la majorité ? Comment transformer la richesse humaine et culturelle du pays en une véritable force économique et sociale ?

La réponse réside dans un retour à nos racines : l’esprit de Dessalines, celui de l’indépendance, de la souveraineté et de la justice sociale. Il nous faut réinventer une économie basée sur nos propres ressources et orientée vers nos besoins locaux. Il nous faut réapprendre à faire confiance à notre capacité collective à construire un avenir viable.

En écho à « Nation cannibale », l’avenir d’Haïti repose sur la capacité de son peuple à briser les chaînes de cette exploitation multiforme. Il est temps de cesser d’être une nation dévorée pour redevenir une nation bâtisseuse. Et cela commence par la prise de conscience que personne ne viendra nous sauver si nous ne le faisons pas nous-mêmes.

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